L'excision des petites filles.

Par Aïda B.
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Il y a des pratiques que nos ancêtres eux-mêmes s’ils revenaient à la vie trouveraient caduques et dépassées
(Amadou Hampaté Bâ)
citation du Sage de l’Afrique, écrivain malien.



Quelque 2 millions de fillettes de 4 à 12 ans sont mutilées chaque année. L’OMS estime qu’ entre 100 et 132 millions dans 26 pays d’Afrique, Moyen-Orient et Asie ont été mutilées ! Sous prétexte de préserver la virginité, exigée par les maris, et supprimer les pulsions sexuelles, ces fillettes subissent l’excision avec infibulation, ou bien après l’ablation totale des parties génitales externes, la couture des deux côtés de la vulve. Ce traumatisme qu’aucune religion n’impose et que seule la tradition perpétue est répété à chaque naissance quand on coupe à nouveau pour permettre le passage de l’enfant.

Cette mutilation sexuelle est non seulement une discrimination notoire envers les filles mais l’une des pires violations de la Convention relative aux Droits de l’enfant. Elle entraîne, outre la peur et la douleur violente, des conséquences qui peuvent se révéler extrêmement graves dont des hémorragies prolongées, des septicémies, le tétanos, la stérilité et parfois la mort. A travers les femmes migrantes beaucoup de pays sont désormais sensibilisés à créer des lois contre cette pratique

Mutilations génitales féminines.

Ces mutilations sont classées en quatre catégories

Excision dite « sunna » : ablation ou incision du capuchon du clitoris.

Excision ou clitoridectomie : ablation du clitoris et, souvent, des petites lèvres. Cette opération, la plus fréquente, est pratiquée dans plus de 25 pays d’Afrique noire, ainsi que, dans une moindre mesure, en Asie (notamment en Indonésie et en Malaisie), au Moyen-Orient (notamment en Égypte et au Soudan et dans la Péninsule arabique, notamment au Yémen). Son équivalent chez l’homme serait l’ablation du gland du pénis.

Infibulation ou circoncision pharaonique : excision doublée de l’ablation des grandes lèvres, suivie de la suture bord à bord des deux moignons. Ne subsiste qu’une petite ouverture permettant le passage des urines et du flux menstruel. Cette opération est pratiquée à Djibouti, en Égypte, dans certaines régions d’Éthiopie, au Mali, en Somalie et dans le nord du Soudan.

Autres types de mutilations sexuelles féminines : perforation, perçage ou incision du clitoris et/ou des lèvres ; nymphotomie ou ablation des petites lèvres; cautérisation par brûlure du clitoris et des tissus qui l’entourent ; curetage de l’orifice vaginal ; scarification du vagin ; introduction de substances corrosives dans le vagin pour provoquer des saignements ou introduction d’herbes, toujours dans le vagin, dans le but de le resserrer ou de le rétrécir.



De plus en plus de femmes décident de se faire opérer afin de réparer les dommages causés par l’excision. Le chirurgien français Pierre Foldes a redonné espoir à de nombreuses Africaines : « Quand on cherchait dans les livres de chirurgie, il n’y avait aucune solution apportée au clitoris, alors que nous avions des centaines de techniques pour réparer la verge, rien n’existait sur le clitoris. Le clitoris, en fait, il fait 10 à 11 cm. Il est aussi grand quasiment que la verge, simplement il est enfoui et caché dans l’anatomie féminine et donc ce qui est blessé dans une mutilation, même grave, c’est juste l’extrémité…on va libérer les ligaments pour regagner la longueur, et on reconstruit la partie du gland qu’on réimplante dans sa position anatomique normale.  » Le docteur Foldes a déjà opéré près de 2 000 femmes. Grâce à lui, le coût de l’opération est remboursé par la sécurité sociale.

Mais bien que l’ouverture du sexe ne soit qu’une intervention bénigne, nombre de femmes hésitent à faire opérer cette partie du corps, cause de tant de souffrances. Elles craignent que l’opération du clitoris ne les traumatise à nouveau. C’est pourquoi elles plaident en faveur de solutions plus simples, telles que la désinfibulation: La désinfibulation est un renversement partiel de l’infibulation, elle est nécessaire avant tout coït vaginal.

La désinfibulation consiste à sectionner la suture formée par l’accolement des grandes lèvres sur la ligne médiane afin de permettre l’accès à l’orifice externe du vagin et, par conséquent, pour permettre la pratique des rapports sexuels vaginaux. La femme réinfibulée pendant sa grossesse requiert également une désinfibulation (plus large) avant son accouchement.

La désinfibulation permet aussi de libérer le méat urinaire et retrouver une miction urinaire normale.

Suite à la désinfibulation, il est habituel de demander au couple d’avoir des relations sexuelles fréquentes pour éviter l’accolement et une réinfibulation secondaire.

« Avant de penser à sa sexualité, il faut d’abord que la femme se porte bien, qu’elle accepte son corps et apprenne à se le réapproprier dans son fonctionnement normal. La sexualité ne vient qu’après. Ce qui compte, c’est de reconstituer les organes qui permettent de mener une vie normale – sans démangeaisons, pertes ou saignements ».

C’est la position de certains religieux qui a été jusqu’ici le plus grand obstacle aux actions de sensibilisation. Même si les campagnes atteignent aujourd’hui même les populations les plus isolées, ce sont toujours les guides religieux qui ont le dernier mot.

Les changements ont la vie dure. Les traditions, les habitudes, les rites et le refus de voir certaines vérités feront souffrir encore combiens d’êtres humains ?